En attendant, la France, comme de nombreux pays, soutient les travaux de recherche sur cette technologie. Depuis 2001, l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) a placé le captage et le stockage du CO2 (CSC) parmi ses actions prioritaires. Cette solution est perçue par l'agence comme un moyen complémentaire aux solutions d'efficacité énergétique et au développement des énergies renouvelables. Le Fonds démonstrateurs de recherche, piloté par l'ADEME, et destiné à valider les résultats obtenus par la recherche, a d'ailleurs affecté 100 millions d'euros au CSC, avec un objectif : avoir des technologies déployables d'ici 2030, selon Régis Le Bars, chef de projet du fonds démonstrateur de recherche de l'ADEME.
Une technologie d'avenir ?
Destinée à capter les émissions des grands sites industriels, cette technologie permettrait de les réduire en les séquestrant dans le sous-sol, idée qui séduit les acteurs de l'industrie.
Mais pour les associations environnementales, le CSC a de nombreux défauts. Cette technologie est aujourd'hui coûteuse et émettrice de CO2 : elle nécessite près de 40 % d'énergie supplémentaire pour capter, transporter et stocker le carbone. Les travaux menés actuellement visent en priorité à réduire le poste du captage, responsable de 80 % des coûts.
Ensuite, le CSC est jugé peu fiable à long et très long terme par les associations : selon le réseau France Nature Environnement (FNE), les forages et la gestion des puits, au-delà de 100 ans, posent des problèmes de sécurité. Il y a un travail à faire sur l'acceptabilité sociale de cette technologie, admet Régis Le Bars. L'objectif des recherches que nous soutenons est d'analyser le comportement du carbone injecté à faible dose. Nous pourrons étudier la diffusion de la bulle de CO2, les risques en cas de faille, la profondeur idéale de stockage et le type de roches à privilégier.
Enfin, pour les associations, cette technologie détourne les financements des autres alternatives. Dans une prise de position, le réseau FNE affirme que c'est une technologie qui ne doit être utilisée qu'en dernier ressort et qui ne doit pas détourner les efforts pour développer les 3 solutions réellement durables : sobriété et efficacité énergétique, énergies renouvelables.
Trois procédés de captage et de stockage
Il existe actuellement trois procédés pour capter le carbone : le captage en post-combustion (un solvant va piéger le CO2 dans les fumées issues des cheminées), l'oxycombustion (lors de la combustion, l'introduction d'oxygène génère des fumées principalement composées de carbone) et la pré-combustion (captage du CO2 avant la combustion). Si la méthode de pré-combustion est actuellement mature, les techniques de post-combustion et d'oxycombustion nécessitent encore de nombreux ajustements. Nous avons donc décidé de soutenir, à travers le fonds démonstrateur, ces deux technologies, commente Régis Le Bars. Ces deux méthodes sont également moins coûteuses que la post-combustion.
Concernant le stockage, plusieurs solutions sont envisagées : les aquifères salins profonds (des cavités souterraines remplies d'eau salée), les réservoirs pétroliers et gaziers en fin d'exploitation et les veines de charbon inexploitées. Nous avons choisi d'axer les travaux sur les aquifères salins, disponibles à grande échelle dans le monde. Il s'agit d'injecter à forte pression du carbone dans les aquifères, explique Régis Le Bars.
Cinq projets en cours de validation
L'ADEME, qui a lancé un appel à manifestation d'intérêt en septembre 2008, a reçu cinq dossiers, dont la plupart sont en cours d'instruction. Les projets devraient démarrer fin 2009 et s'étaler sur cinq à sept ans. Ils concernent soit le captage, soit le stockage.
Le projet Pil Ansu, présenté par Alstom, EdF, GdF-Suez et Armines, a pour objectif la réalisation d'un démonstrateur de captage du CO2 par antisublimation (givrage puis dégivrage des gaz) sur les fumées d'une centrale à charbon. Ce démonstrateur, première mondiale sur cette technologie, sera expérimenté sur une centrale de production d'électricité à charbon.
Alstom et EDF ont présenté un projet de captage en post-combustion avec des solvants avancés.
Veolia, en partenariat avec Geogreen, a soumis un projet de captage et stockage du CO2 dans un incinérateur à Claye-Souilly (Seine-et-Marne). Le CO2 sera injecté dans un aquifère salin situé à plus de 1.500 mètres de profondeur.
Arcelor Mittal, en partenariat avec Paul Wurth et Geogreen, souhaite expérimenter à Florange-en- Moselle le captage et le stockage de carbone émis par un haut fourneau.
Enfin, Total souhaite expérimenter le stockage et le potentiel des aquifères salins du bassin parisien.
Rappelons que Total a un également autre projet dans les starting blocks : celui de Lacq, dans les Pyrénées Atlantiques. Ce projet est destiné à tester la chaîne complète du CSC, du captage par oxycombustion à la séquestration.