Comment déployer le vrac en grande surface ? Comment permettre la vente en vrac des produits des grandes marques ? C'est sur ces questions que se penchent depuis un an le Périfem, qui fédère les acteurs de la distribution, l'Institut de liaisons des entreprises de consommation (Ilec), qui rassemble une centaine de fabricants de produits de grande consommation, ainsi que le Pacte national emballage plastique, signé en 2019 par des distributeurs, des producteurs et des ONG. Leur initiative « En avant vrac ! », lancée en octobre 2022, vient de présenter ses premiers résultats.
Le 30 janvier, ils ont présenté un registre de solutions harmonisées (1) . Rien de révolutionnaire, mais plutôt des solutions qui satisfont la soixantaine d'acteurs d'En avant vrac ! et permettent d'envisager le déploiement de mobiliers et de contenants standardisés, ainsi qu'une solution de traçabilité unique. Cette solution doit encore être expérimentée en grande surface (voir encart).
Une expérimentation d'ici la fin de l'année
Les solutions préconisées par le collectif vont maintenant être expérimentées dans une quinzaine de magasins de cinq enseignes : Auchan, Carrefour, Intermarché, Leclerc et Supermarchés Match. U Enseigne pourrait également les rejoindre.
« Pour ces expérimentations, une première phase de recherche et développement avant le lancement dans les magasins ainsi que des études seront menées pour vérifier la viabilité technique, économique, mais aussi environnementale et l'appétence des consommateurs », explique le collectif qui espère que les premiers dispositifs seront disponibles en magasin d'ici « quelques mois ».
Depuis 2020 et la crise du Covid, le marché du vrac est en perte de vitesse, rappelle Gaëlle Le Floch. La directrice Strategic insights de Kantar Worldpanel explique que le nombre de Français consommant des produits en vrac a reculé de 2,4 points, à 37 %. Dans les grandes lignes, le marché se porte encore bien dans le circuit spécialisé, mais il recule dans les grandes enseignes généralistes. Pourtant, celles-ci ont l'obligation de consacrer au vrac 20 % de leur surface de vente en 2030. Et d'illustrer le défi à relever : il faut que le vrac passe en cinq ans d'environ 1 à 3 % du chiffre d'affaires des grandes enseignes.
Pour assurer son développement, le vrac peut miser sur plusieurs points forts, à commencer par la réduction des emballages à usage unique en plastique et du suremballage. Deux sujets très importants pour les consommateurs, selon Kantar Worldpanel. Mais les études consommateurs montrent aussi que, pour passer des paroles aux actes, 54 % des Français (et 73 % des consommateurs de vrac) attendent de retrouver leurs marques favorites en rayon vrac. Et cela, en assurant des prix compétitifs.
Pour répondre à ces enjeux, une soixantaine d'acteurs représentant les marques nationales et la distribution, les apporteurs de solutions et sept organisations, comme l'Agence de la transition écologique (Ademe), Citeo et le Réseau Vrac et Réemploi, ont réfléchi à une solution harmonisée qui permette d'optimiser la vente de produits de marques nationales et de marques de distributeurs en grandes et moyennes surfaces.
Les travaux ont porté sur deux catégories de produits : l'épicerie (dont l'alimentation animale) et les produits de droguerie-parfumerie-hygiène. Quatre enjeux ont été identifiés : les modalités de distribution en magasin (le mobilier de vente) ; le
Un dispositif basé sur des poches en plastique
Concrètement, la réflexion a abouti à un registre qui présente les principes retenus et propose des spécificités techniques concernant les contenants, la codification numérique des contenants vrac et un QR code augmenté rassemblant l'information et la traçabilité des produits. Les solutions retenues sont assez classiques et s'inspirent de dispositifs existants. Le principal intérêt de la démarche n'est pas l'originalité de la solution proposée, mais plutôt de rassembler de nombreux acteurs autour de standards.
Premier enseignement : fini le transvasement de produits contenus dans de grandes poches dans des équipements de distribution pour la vente en vrac aux consommateurs (bacs, trémies, fûts, etc..). Les industriels considèrent que le transvasement expose leurs produits à des risques sanitaires trop importants qui menacent leur réputation. Côté distributeurs, l'organisation d'un rayon vrac basé sur le transvasement est jugée trop lourde.
Le modèle retenu privilégie la livraison des produits destinés au vrac dans des poches en plastique souple livrées remplies par les industriels. Celle-ci se raccorderaient à des « stations d'accueil magasin » permettant la distribution en quantité choisie. L'idée étant que la station puisse accueillir toutes sortes de poches proposées par les marques. Ces poches pouvant varier selon le contenu pour répondre à des spécificités du produit (condition de conservation, densité du produit, etc.).
Pour l'instant, le travail se concentre sur des poches jetables, mais le collectif envisage des poches réemployables lorsque les détails seront arrêtés et, surtout, si une solution de réemploi d'emballages en plastique souple émerge. Pour l'instant, des prototypes de poches souples réemployables seront créés, afin d'évaluer la faisabilité technique de leur lavage industriel et de leur remplissage, ainsi que leur résistance à l'usure.